Point de vue | Les professionnels du droit des entreprises estiment que la confidentialité doit être absolue
En réaction à un article signé par le rapporteur général de l'Autorité de la concurrence dans le journal "Les Echos", Olivier Fréget, Didier Théophile, Mélanie Thill-Tayara et Philippe Guibert défendent la nécessité de protéger intégralement les avis donnés par les juristes d'entreprise.
Écrit par Olivier Freget, qui est avocat à Paris, ainsi que Didier Theophile, également avocat, et Mélanie Thill-Tayara.
Dans près de la moitié des États membres de l'OCDE, les avis des avocats d'entreprise restent confidentiels, en particulier en ce qui concerne les autorités de la concurrence. Cette confidentialité a un objectif clair : elle garantit que l'avocat a la liberté d'exprimer son opinion afin de conseiller sa direction sur les différentes stratégies à adopter en matière de droit de la concurrence.
Si le contenu du document reste confidentiel, il n'a pas à s'inquiéter qu'il puisse être utilisé comme preuve pour accuser son employeur d'avoir intentionnellement enfreint la loi, ce qui pourrait entraîner des conséquences désagréables.
La raison d'être de cette mesure de protection de la vie privée est donc évidente. Lorsque les avocats s'expriment, ils peuvent plus aisément concilier l'intérêt de respecter la loi avec celui des différentes personnes impliquées. S'ils s'abstiennent d'écrire, ils ne peuvent plus efficacement remplir cette fonction.
Jusqu'à maintenant, la France était malheureusement parmi les pays qui refusaient d'accepter cette approche pragmatique qui respecte les libertés fondamentales. Après de nombreuses années de débat, une loi a été adoptée et est en cours d'examen par la Commission mixte paritaire. Une opposition finale, inattendue, vient d'être exprimée par le rapporteur général de l'Autorité de la concurrence.
Aussi à prendre en compte:
INTERVIEW – "La compétition est une mesure de protection contre l'accaparement des bénéfices".
Selon l'auteur de cet article, il est important que l'Autorité puisse toujours accéder aux notes des juristes internes. Il explique que si les avis des juristes restent confidentiels pour l'Autorité, cela limiterait sa capacité à obtenir des preuves contre les entreprises. Cela compromettrait l'efficacité de l'Autorité dans l'application du droit de la concurrence de l'Union, rendant ainsi cette mesure inefficace pour ses services.
En outre, le responsable principal affirme que cette mesure de protection ne devrait être applicable qu'aux juristes qui ne sont pas liés à leur entreprise, tout comme les avocats le sont vis-à-vis de leurs clients.
Absence d'écriture d'opinions
Cette approche n'est pas recommandée. En premier lieu, les juristes internes évitent généralement de mettre leurs opinions par écrit pour protéger l'entreprise, étant donné qu'il n'existe aucune protection actuelle pour ces avis. Par conséquent, si l'on applique le raisonnement du droit de la concurrence, la perte de "preuves" est relativement insignifiante.
Autre article à consulter:
ANALYSE – Le Sénat cherche à garantir la confidentialité des consultations juridiques fournies par les avocats d'entreprise.
De plus, l'une des principales caractéristiques du droit de la concurrence est que ses infractions sont considérées comme "objectives". Cela signifie que la subjectivité de celui qui prend une décision potentiellement anticoncurrentielle n'a aucune incidence juridique sur la constatation de l'infraction, contrairement au droit pénal.
Le point de vue du juriste ne peut pas et ne devrait pas être considéré comme une preuve, car il n'est pas juridiquement nécessaire de prouver si l'entreprise a intentionnellement violé ou non le droit de la concurrence pour qualifier une infraction.
Protection de la vie privée préservée
Enfin, il est nécessaire de réfléchir plus en profondeur à l'argument selon lequel les juristes d'entreprise ne devraient pas bénéficier d'une protection de leurs avis, aussi courants soient-ils, en raison de leur manque d'indépendance.
Il est important de protéger la confidentialité des avis des salariés car ils se trouvent dans une position de "dépendance".
Le fait que les avocats soient une profession indépendante ne signifie pas que la confidentialité de leurs conseils soit nécessaire et légitime. En effet, sans cette confidentialité, ils ne pourraient pas fournir de conseils à leurs clients, car ces derniers ne se confieraient pas à eux. Ainsi, un juriste qui conseille son employeur pour qu'il agisse dans le respect du droit de la concurrence n'exerce pas une fonction différente de celle d'un avocat envers ses clients, mais il ne bénéficie pas de la même protection que ce dernier en raison de son statut.
En effet, la confidentialité des opinions d'un salarié doit être renforcée précisément en raison de sa position de "dépendance".
Olivier Fréget, Philippe Guibert, Didier Théophile et Mélanie Thill-Tayaras sont des avocats exerçant au barreau de Paris.
Les personnes impliquées sont Olivier Fréget, Didier Théophile, Mélanie Thill-Tayara et Philippe Guibert.
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