Il semble très probable que la gauche britannique revienne au pouvoir après 14 ans dans l'opposition, selon l'analyse d'Eric Le Boucher. Qui compose cette nouvelle gauche ?
Écrit par Eric LE BOUCHER, qui est un éditorialiste pour le journal "Les Echos".
Rishi Sunak, le Premier ministre britannique, a récemment surprenant tout le monde en déclarant des élections législatives anticipées le 4 juillet. Il ne s'attend pas à remporter la victoire, car les travaillistes sont en tête dans les sondages avec une avance de 21 points sur son parti conservateur.
En organisant une campagne électorale rapide de six semaines, il espère préserver le plus de sièges possible pour ses partisans. Il semble probable qu'après 14 ans dans l'opposition, la gauche va revenir au pouvoir au Royaume-Uni. Mais qui compose ce mouvement politique ?
Il est important de souligner qu'elle possède des idées. Il est intéressant de constater que la réflexion politique de gauche reste active au Royaume-Uni, grâce à de nombreux think tanks, alors qu'elle a du mal à s'exprimer sur le continent européen. En Allemagne, elle est étouffée par le conservatisme du statu quo, tandis qu'en France, elle se limite à une approche primaire de "taxer et dépenser", mettant l'accent sur la taxation des riches comme solution principale pour le bonheur socialiste.
Il est hors de question d'imposer des impôts aux personnes riches. Lorsque l'on voit enfin un parti socialiste émerger lors des élections européennes, osant un peu se distancer de sa dépendance à l'égard de Jean-Luc Mélenchon, on peut penser que sa prochaine étape sera de suivre l'exemple des travaillistes : le nouveau modèle de la gauche se construira en Grande-Bretagne. Il est important de souligner dès maintenant que l'idée d'imposer les riches est exclue.
En général, la tendance politique est plus progressiste que le blairisme, qui favorisait l'intervention minimale de l'Etat dans l'économie. On revient à un Etat plus actif, chargé de résoudre les problèmes tels que l'instabilité économique, le manque de croissance, la détérioration des services publics et les inégalités entre les régions.
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Suite à la décision du Brexit, le parti de droite a provoqué davantage d'instabilité, comme en témoigne le changement fréquent de Premiers ministres. L'idée d'un "Grand Singapour" s'est effondrée avec la fin de la mondialisation et l'émergence d'un monde divisé.
Keir Starmer, le leader du parti travailliste, affirme que l'Etat doit agir sur deux problèmes principaux : le manque d'investissement et l'instabilité sociale. En comparaison à la France qui investit 25% de son PIB, la Grande-Bretagne n'investit que 15%. Il est donc nécessaire de relancer les investissements publics dans des secteurs tels que la santé, l'éducation et les régions, tout en établissant une planification pour des partenariats clairs avec le secteur privé dans des domaines tels que l'urbanisme, l'énergie et la décentralisation.
Dans cette situation, il est prévu de ne pas augmenter l'impôt sur les sociétés (25 %). L'objectif est de stimuler la croissance car c'est elle qui permet de financer les services publics et d'améliorer le niveau de vie. Les personnes de gauche en France qui pensent qu'elles doivent suivre les écologistes dans leur approche de la "décroissance" ont matière à réflexion.
Il est important de ne pas augmenter le déficit : les travaillistes s'engagent à diminuer la proportion de la dette par rapport au PIB. Il sera nécessaire de faire la distinction entre les dépenses d'investissement et les dépenses courantes, et de trouver un équilibre entre ces deux types de dépenses.
L'idée de "Securonomics" se concentre sur le rétablissement d'une sécurité pour les travailleurs afin de favoriser une croissance partagée. L'incertitude concernant l'avenir crée de la peur et alimente le populisme. Rachel Reeves, future chancelière de l'Echiquier fantôme, souligne que la sécurité et la prospérité des travailleurs sont essentielles pour renforcer la force, la dynamique et la légitimité d'une économie de marché.
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Elle évoque le concept de "sécuronomie" qui vise à créer une plateforme de droits pour permettre aux individus de progresser en fonction de leurs mérites, et non de facteurs indépendants de leur volonté. Bien que la flexibilité du marché du travail britannique soit un avantage, elle est souvent déséquilibrée et certains contrats sont abusifs.
Rachel Reeves souhaite s'inspirer de l'équipe de Biden pour mettre en place une économie moderne axée sur l'investissement, l'augmentation des salaires et la revitalisation de la classe moyenne.
Le Royaume-Uni diffère des États-Unis en termes de flexibilité financière, ses pratiques sont figées et le Brexit représente un obstacle majeur pour le commerce et la reprise économique. Après une gestion chaotique de 14 ans par le parti de droite, la gauche revient avec un programme prometteur qui nécessite toutefois des clarifications.
Elle a un objectif clair pour l'avenir et espère que les élections lui permettront de trouver la volonté politique nécessaire pour mettre en place des réformes en Allemagne et en France, ce qui fait actuellement défaut sur le continent.
Eric Le Boucher travaille comme éditorialiste pour le journal « Les Echos ».
Eric Le Boucher
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