Dans son récent livre, Jean-François Colosimo explore comment cinq anciens empires qui ont été relégués au second plan par l'Occident pendant des siècles cherchent à se venger aujourd'hui en utilisant une combinaison de religion, d'autoritarisme et d'agressivité.
Écrit par Henri Gibier
Malgré un contenu peu important, la visite officielle du président chinois Xi Jinping à Paris a attiré l'attention des habitants. Pour assurer la sécurité du leader chinois, le centre de Paris a été fermé pendant presque une journée entière. Les mesures de sécurité et d'accueil mises en place pour cette visite étaient comparables à celles habituellement réservées à un président américain, chef de la première puissance mondiale et de notre allié le plus important sur le plan stratégique.
La Chine est non seulement un partenaire commercial crucial, mais également un acteur qui peut être perçu comme un adversaire sur de nombreux aspects. En tant que superpuissance émergente, elle est en mesure de rivaliser avec les Etats-Unis pour prendre un jour la tête du monde.
Que cela lui plaise ou non, la France, dont les dirigeants formés à Sciences Po ont longuement débattu pendant des années pour déterminer si elle était une puissance moyenne importante ou une puissance moyenne importante, se retrouve maintenant dans l'obligation de faire attention au géant chinois, même s'il n'est pas facile à gérer.
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Le regain de puissance de la Chine sur la scène internationale, qualifié de "néo-empire" par Jean-François Colosimo, s'inscrit dans un mouvement plus large analysé par l'auteur dans son ouvrage, à la fois érudit et inquiétant.
Il mentionne cinq anciens empires qui ont été influencés par l'Europe au XVIIIe siècle et ont tenté sans succès de s'émanciper en imitant l'Occident au XIXe siècle. Ils ont finalement adopté une approche nationaliste et autoritaire qui persiste jusqu'à aujourd'hui.
L'Europe est confrontée à des difficultés
En Chine, le régime communiste met en avant son idéologie, mais c'est surtout l'économie qui est le principal facteur de sa montée en puissance, en utilisant ouvertement la force dans sa région d'influence.
Malheureusement, Vladimir Poutine a décidé d'utiliser la guerre pour réaliser son ambition de retrouver la grandeur passée de la Russie, en rappelant l'époque de Pierre le Grand ou de Staline. De son côté, l'Iran, dirigé par Ali Khamenei, cherche à étendre son influence sur le Moyen-Orient et au-delà en se basant sur la religion musulmane, héritée de l'Empire perse.
Deux nouveaux empires en développement identifiés par Colosimo semblent moins clairement définis dans leur direction future. En utilisant habilement sa position géostratégique en tant que point d'équilibre entre l'Orient et l'Occident, la Turquie de Recep Tayyip Erdogan, malgré ses tendances autocratiques croissantes et son rapprochement avec d'autres nouveaux empires, continue de se revendiquer démocratique et reste attentive à maintenir des liens avec le camp occidental.
Le gouvernement dirigé par Narendra Modi en Inde continue de se présenter comme étant la plus grande démocratie du monde et adopte une position de neutralité en matière de relations internationales.
Les nationalismes renaissent
Dans son livre, Jean-François Colosimo raconte avec passion et en mettant en avant les moments clés, le mouvement ancien qui a mené ces cinq empires en déclin à réapparaître au XXIe siècle sous la forme de nouveaux empires conquérants, unis par leur opposition à un Occident largement fantasmé.
Selon l'historien théologien, aucun critère tel que le régime démocratique, l'économie libérale ou la culture commune ne suffit à expliquer pourquoi l'Australie et la Nouvelle-Zélande font partie du camp occidental tandis que les pays d'Amérique latine en sont exclus.
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ANALYSE Notre relation avec le Sud global
La mondialisation n'a pas conduit à une uniformisation occidentale du monde, mais a plutôt renforcé les nationalismes grâce à la compétition commerciale et à la valorisation des identités religieuses en opposition au modèle universel promu par les Etats-Unis et l'Europe.
Selon l'essayiste, il ne s'agit pas d'une prochaine guerre mondiale, mais plutôt de la première guerre mondiale à l'échelle mondiale qui a déjà commencé. Il met en avant le rôle crucial de la superpuissance américaine dans cette situation, en particulier après les événements du 11 septembre 2001 qui ont conduit à la guerre désastreuse en Irak.
La force de résistance
Depuis ce moment, le modèle américain est en train de se diviser de plus en plus, même de l'intérieur après l'élection de Donald Trump et sa sortie tumultueuse de la Maison Blanche marquée par l'attaque contre le Capitole.
Dans ce contexte, la France se retrouve à la fois isolée mais également dans une position privilégiée pour réveiller en Europe l'esprit de résistance. Selon Colosimo, elle est la principale cible en Europe de la cyberguerre menée par la Russie, la Chine et la Turquie afin de la discréditer auprès du Sud global. Le livre conclut en appelant le gouvernement à renforcer économiquement, militairement et diplomatiquement notre pays.
Est-ce que cela nécessite inévitablement un renforcement du nationalisme ? Selon l'auteur, il est temps pour la France de revendiquer sa singularité en affirmant que les autres pays membres la suivront éventuellement. Cependant, cela doit se faire en préservant les réalisations de l'Union européenne, qui a réussi, peut-être de manière unique, à se reconstruire non pas en désignant un ennemi extérieur, mais en faisant face à ses propres problèmes internes.
Emmanuel Macron propose un chemin délicat dans son deuxième discours à la Sorbonne. Son approche de conciliation entre différentes idées semble particulièrement pertinente cette fois-ci.
Livre: L'Occident, principal ennemi du monde
analyse
Écrit par Jean-François Colosimo, publié par les éditions Albin Michel, 252 pages, au prix de 21,90 euros
Henri Gibier
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