La France a enfin mis en place les outils nécessaires pour faire face à la transition climatique. Jusqu'à présent, la stratégie de financement était détaillée chaque année dans la loi de finances, mais le gouvernement va maintenant élaborer une stratégie pluriannuelle. Benoît Leguet se réjouit de cette décision, qui est essentielle pour une planification écologique efficace.
Par le responsable de l'I4CE – Institut de l'économie pour le climat, Benoît Leguet.
Le budget pour l'année 2024, tel qu'il est présenté dans le projet de loi de finances, témoigne de l'engagement d'Elisabeth Borne et d'Emmanuel Macron à réduire notre dépendance aux énergies fossiles. Des dépenses supplémentaires sont prévues en faveur de la transition écologique, notamment pour soutenir la rénovation des bâtiments, les transports en commun, les véhicules électriques et la transition agricole. Ces aides représenteront une augmentation de 7 milliards d'euros dans le budget de l'État pour l'année 2024.
Cette initiative sans précédent, selon les termes utilisés par le gouvernement, devra être maintenue sur une longue période. En effet, le rapport de Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz estime que des besoins supplémentaires en financement public d'environ trente milliards d'euros par an seront nécessaires d'ici 2030 pour financer la transition. Parallèlement, l'équilibrage du budget deviendra de plus en plus complexe : l'arrêt du bouclier tarifaire en 2024 a en effet permis de dégager des marges de manœuvre exceptionnelles.
Comment maintenir un effort sur une longue période ? Les autorités publiques se posent deux questions : comment l'État peut-il prévoir les besoins de financement public, tant de la part de l'État que des collectivités locales ? Et comment attirer les investissements du secteur privé en lui offrant de la visibilité, afin d'assurer le financement complet de la transition ?
Une solution à ces deux questions pourrait être une loi de programmation des finances publiques axée sur la transition écologique. Malheureusement, cette option est actuellement écartée, ce qui est dommage. Cependant, une avancée importante se trouve dans la loi de programmation des finances publiques, qui devrait guider la trajectoire budgétaire de la France jusqu'à la fin du quinquennat. La Première ministre a utilisé l'article 49.3 pour faire passer cette loi, qui a été modifiée par les parlementaires. Elle prévoit que le gouvernement présente chaque année au Parlement une stratégie pluriannuelle définissant les financements de la transition écologique et de la politique énergétique nationale. Cette stratégie devrait également être débattue à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Pour en savoir plus, consultez également :
DOSSIER : Les informations essentielles sur le budget 2024.
Il est surprenant de constater que la transition écologique, qui est une transformation économique à long terme, a été jusqu'à présent menée sans une vision claire en ce qui concerne le financement et les efforts budgétaires publics. Chaque année, les projets de loi de finances sont élaborés sans se soucier de la question de savoir qui paiera sur le long terme. De plus, les dirigeants de divers partis politiques, d'Eric Ciotti à Marine Tondelier, ont demandé davantage de perspectives financières sur la transition écologique, suite à leur rencontre avec Elisabeth Borne au début du mois de septembre.
À partir de 2024, le gouvernement devra dorénavant expliquer chaque année, avant l'examen du projet de loi de finances, sa stratégie pluriannuelle de financement de la transition et la soumettre à discussion. Cela permettra au gouvernement et au Parlement d'anticiper les besoins financiers publics, tandis que les collectivités locales et le secteur privé – principaux financeurs de la transition – auront une vision à moyen terme pour prendre des décisions éclairées concernant les investissements nécessaires en termes de ressources matérielles et humaines. Cette approche se rapproche en fin de compte d'un modèle bien connu dans le secteur privé : un plan d'affaires à moyen terme, discuté avec la gouvernance, et révisé chaque année pour tenir compte des imprévus.
Comment élaborer un tel plan d'affaires pour l'État ? Une chose est certaine : la transition ne pourra pas être financée uniquement par des subventions publiques, sans réglementation ni imposition, ni même avec simplement un prix du carbone "correct" et un soupçon de finance verte. La bonne combinaison de mesures à mettre en œuvre dépendra de l'objectif et du secteur à transformer. Pour engager un débat constructif sur la manière la plus efficace et équitable de financer la transition, il sera donc nécessaire que chaque membre du Parlement accepte de sortir de sa position figée. Et que le gouvernement joue le jeu.
Benoît Leguet, qui occupe le poste de directeur à l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE).
Benoît Leguet est l'auteur de
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