Il semble que le Moyen-Orient soit sur le point de franchir une nouvelle étape de sa tragédie, presque dix mois après le 7 octobre. Selon Dominique Moïsi, cette escalade du conflit pourrait mener à une guerre régionale à grande échelle.
Écrit par Dominique Moïsi, qui est un expert en géopolitique et conseiller spécial de l'Institut Montaigne.
Est-ce que le Moyen-Orient va bientôt connaître un nouveau conflit entre le Hezbollah, l'Iran et Israël ? Le premier acte de cette tragédie a débuté le 7 octobre dans la violence. Le deuxième acte pourrait déclencher une guerre régionale à grande échelle.
Après une période de neuf mois de violents affrontements à Gaza, avec environ 40 000 morts du côté palestinien, dont au moins 2/3 de civils, les Israéliens ont rétabli leur stratégie prédominante consistant à éliminer de manière ciblée leurs ennemis, allant de Beirut à Téhéran en passant par Gaza.
Les services de renseignement israéliens ont une fois de plus montré leur efficacité, malgré les attaques de l'Iran, du Hezbollah, des Houthis et du Hamas. Vont-ils considérer qu'ils ont atteint leur objectif principal, celui de rétablir leur dissuasion stratégique, et chercher maintenant à conclure un accord à Gaza en échange de l'arrêt des hostilités et la libération des otages ?
Le souci est que cette perspective logique, probablement adoptée par les hauts responsables de l'armée, n'est probablement pas partagée par Benyamin Netanyahou ni par les survivants des dirigeants du Hamas. Le Premier ministre israélien est fixé sur des considérations immédiates, davantage liées à son propre avenir qu'à celui de son pays.
Le chef du Hamas à Gaza, Yahya Sinouar, se voit comme le successeur de Salah al-Din (Saladin), celui qui a obtenu la victoire de Dieu. Selon lui, son martyr hâtera la chute de l'État d'Israël, qui finira par subir le même sort que les Royaumes Croisés de Jérusalem. Dans ces conditions, pourquoi accepterait-il de faire des compromis ?
Les Mollahs ont été humiliés par un attentat spectaculaire contre IsmaÏl Haniyeh, le chef politique du Hamas, au cœur de leur capitale. Cet acte met en évidence la fragilité de leur régime et les pousse à réagir de manière concrète pour ne pas perdre la face. Ils prennent le risque de voir les tensions s'intensifier et dégénérer en un conflit régional majeur et une guerre totale.
Malgré les mises en garde répétées du président Joe Biden, qui est un ami de longue date d'Israël et dont l'authenticité ne peut pas être remise en question, est-ce que les dirigeants israéliens sont tombés dans le piège tendu par le Hamas ? En se sentant humiliés, vous avez transformé en barbares. Votre désir de vengeance vous a peu à peu transformé en parias sur la scène internationale.
Un des grands problèmes en Israël est que, avec le temps, les Palestiniens ont eu l'opportunité de mieux comprendre les Israéliens à travers leur occupation et leur détention dans les prisons israéliennes, tandis que les Israéliens ne les comprenaient pas autant. Il y avait une époque où les dirigeants civils et militaires israéliens pensaient qu'il était essentiel de parler l'arabe, de connaître l'histoire et la civilisation palestiniennes pour pouvoir interagir avec eux.
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Il semble que les attitudes actuelles soient bien différentes. Un sentiment de supériorité mêlé d'indifférence, une obsession pour la richesse dans un monde globalisé, une adoration excessive pour la terre, des réactions basées sur l'identité et la sécurité, la résurgence des douleurs du passé qui ne disparaissent pas, en plus de la radicalisation en Israël et de la corruption au sein de l'Autorité palestinienne, tout semble avoir contribué à la situation dramatique que nous vivons depuis le 7 octobre.
Un passé douloureux qui ne guérit pas
Face à cette situation prévisible de catastrophe, il est urgent de se demander si la communauté internationale est prête à agir pour empêcher le pire. Les États-Unis ont des moyens politiques et économiques pour exercer une pression sur Israël, ainsi que des capacités militaires dissuasives contre l'Iran. La Chine, en tant que principal client de l'Iran en matière d'énergie, a également un rôle à jouer dans ce contexte.
Elle ne souhaite pas une confrontation directe entre Jérusalem et Téhéran, car cela aurait des conséquences néfastes sur l'économie mondiale, impactant directement la croissance de la Chine. On peut regretter le rôle marginal de l'Europe dans cette situation actuelle. Bien qu'elle soit proche de l'action, elle se retrouve davantage en tant que spectateur engagé et potentiellement victime, plutôt que comme un acteur responsable.
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Personnalité: Dominique Mo
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