Est-ce que la France est un pays innovant ?
Si la France est à la traîne en matière d'innovation, c'est principalement dû au manque d'entreprises de taille intermédiaire (ETI) dans le secteur industriel. Christian Saint-Etienne affirme qu'il faudrait doubler leur nombre.
Par un enseignant au Conservatoire national des arts et métiers et membre d'un groupe d'économistes, Christian Saint-Etienne.
Après vingt-cinq ans de déclin industriel, la France cherche à revitaliser son industrie en favorisant la création de start-up et d'entreprises valorisées à plus d'un milliard d'euros, tout en stimulant l'innovation grâce au programme France 2030. Ce programme, lancé en 2021 et mis à jour par Emmanuel Macron en décembre 2023, représente un investissement de 54 milliards d'euros.
Il a mis l'accent sur trois objectifs principaux, à savoir la souveraineté, le plein emploi et la décarbonation, et a présenté sept dossiers spécifiques : 1/ le stockage d'énergie et les nouvelles technologies nucléaires, 2/ l'utilisation de l'hydrogène naturel, 3/ la capture et le stockage du carbone, 4/ la cartographie de nos ressources en métaux critiques, 5/ la production biologique et les technologies liées à la vie, 6/ la fabrication de microprocesseurs pour l'intelligence artificielle, et 7/ les micro-lanceurs réutilisables.
La question principale est de savoir si cette approche est la bonne. De plus, une étude de la Fabrique de l'industrie a été publiée en décembre, analysant les innovations disruptives dans 12 domaines à l'échelle mondiale : hydrogène pour les transports, batteries pour les véhicules électriques, énergie solaire, éoliennes en mer, recyclage des métaux stratégiques, carburants durables pour l'aviation, acier à faible teneur en carbone, recyclage biologique des plastiques, ARN messager, nano-électronique, spintronique et calcul quantique. Les deux tiers de ces domaines sont au centre de la stratégie gouvernementale.
Dans cette étude, les innovations de rupture sont définies en tenant compte de leur performance technologique ainsi que de leur utilisation complètement nouvelle sur le marché.
En dehors de l'Allemagne, qui se classe parmi les quatre principaux déposants mondiaux de brevets dans la moitié des domaines étudiés, les autres pays européens ne sont généralement pas en tête et la France ne figure pas parmi les pays les plus actifs dans ces secteurs. Il est évident qu'il y a un écart significatif entre ce qui est dit et la réalité mondiale.
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Quel est le souci ? Les entreprises des Etats-Unis, de la Chine, du Japon et de la Corée du Sud dominent largement. Il ne s'agit pas des pays en tant que tels, mais bien des sociétés qui en sont originaires. Les start-up sont peu nombreuses dans ce domaine.
Les start-up en France sont importantes, mais elles ne résolvent qu'une partie du problème des innovations révolutionnaires qui sont réellement mises en œuvre à grande échelle. Ce sont en fait les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) technologiques qui sont responsables du travail de la mutation actuelle accélérée du système de production mondial.
Nous faisons face à trois problèmes majeurs. Tout d'abord, il y a une désindustrialisation rapide qui se déroule depuis vingt-cinq ans. Ensuite, nous avons assisté à la disparition de grandes entreprises industrielles françaises au cours des vingt dernières années, telles qu'Alcatel-Alsthom, qui a été absorbé par Alcatel, et Alstom, qui a été divisé en deux. D'autres entreprises telles que Péchiney, Usinor, Thomson et Lafarge ont également disparu. Enfin, nous constatons un manque d'entreprises industrielles de taille intermédiaire.
Selon le directeur de France 2030, il y a eu l'ouverture de 200 usines entre 2021 et 2022.
Comment stimuler l'innovation en France ? Certainement pas en négligeant les start-up françaises ni en abandonnant le projet France 2030. Nous devons encourager la création d'entreprises industrielles à succès (seulement 2 sur les 28 licornes françaises) et intensifier nos efforts pour concrétiser le projet France 2030. Cependant, il est important de souligner que la France ne compte que 3 secteurs d'excellence internationale (aéronautique-défense, grands groupes de services techniques, luxe), après avoir frôlé la disparition de secteurs tels que l'énergie, l'automobile, la pharmacie, l'agro-alimentaire, etc.
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Donc, il est nécessaire d'avoir une politique qui favorise la création de 6 ou 7 industries de premier plan à l'échelle mondiale et qui double le nombre d'entreprises de taille intermédiaire dans le secteur industriel. Cela nécessiterait une réorganisation politique, de nouvelles sources de financement en réaffectant les ressources, et une stratégie déterminée. Un facteur d'accélération indispensable ? Multiplié par dix.
Le fait d'augmenter de deux à quatre le nombre de start-ups valorisées à plus d'un milliard de dollars dans le secteur industriel est positif pour notre fierté. De même, le fait de doubler le nombre d'entreprises de taille intermédiaire industrielles, passant de 2000 à 4000, nous permettra de passer d'une période de déclin à une période de prosp
Christian Saint-Etienne exerce en tant qu'économiste et enseignant universitaire.
Christian Saint-Etienne est un économiste
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